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La réindustrialisation française freinée par la disponibilité des terrains
La réindustrialisation française se trouve au croisement des enjeux de souveraineté économique et de sobriété foncière. Parmi les sujets cruciaux : le foncier industriel. Une mission "flash" interministérielle a été confiée au préfet Rollon Mouchel-Blaisot.
40 ans de désindustrialisation. Et maintenant ?
Le réindustrialisation des territoires est un sujet récurrent. Après plus de 40 ans de désindustrialisation française, les impacts de cette longue transformation de notre économie se sont fait particulièrement ressentir durant la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19 (pénuries d'équipements de protection individuelle, difficultés de production et d'approvisionnement, etc.).
Depuis, la France affiche clairement sa volonté de retrouver une industrie forte, afin de réduire ses dépendances. L'appellation « ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique », en vigueur depuis 2022, est particulièrement révélatrice de ce nouveau cap fixé par l'exécutif. Celui-ci s'illustre également par des plans de relance : France Relance, annoncé en 2020 puis France 2030, annoncé en 2021.
S'ils ont été conçus comme des réponses économiques à la crise, ces plans de relance répondent également à un objectif de long terme : réindustrialiser la France tout en tenant compte des grands enjeux environnementaux. Ainsi, France 2030 prévoit notamment plus de 5 milliards d’euros entre 2022 et 2027 afin de financer les aides directs à la décarbonation de sites industriels. Une ambition qui se traduit également par l'élaboration du projet de loi Industrie Verte.
L'objectif ZAN, un défi d’aménagement du territoire
Cette ambition se heurte toutefois à un problème de taille : la disponibilité du foncier. La France souhaite se réindustrialiser, mais où créer ces nouvelles usines ? Comme le souligne Vincent Moulin-Wrigth, directeur général de France Industrie : « on avait perdu de vue les enjeux fonciers parce que l’industrie ouvrait moins d’usines [mais] la tendance s’est inversée avec un foisonnement d’extensions, de projets nouveaux qui consomment de l’espace » (source : L'Usine Nouvelle).
La concurrence dans l’accès au foncier est accentuée, entre autres, par l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) des sols en 2050, fixé par la loi Climat et Résilience de 2021. D'après cette dernière, le rythme de l’artificialisation des sols dans les 10 années suivant sa promulgation "doit être tel que, sur cette période, la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale soit inférieure à la moitié de celle observée sur les 10 années précédant cette date".
Un objectif qui impose de repenser la gestion du foncier économique dans les territoires (d'après une récente enquête d'Intercommunalités de France, 70% des EPCI estiment que leurs parc d'activité économique arriver à saturation en 2025), en intégrant des principes de sobriété foncière.
Quelle(s) réponse(s) du gouvernement ?
C'est dans ce contexte que Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et Roland Lescure, ministre délégué Chargé de l’Industrie, ont confié le 27 février 2023 au préfet Rollon Mouchel-Blaisot le pilotage d’une mission interministérielle de mobilisation pour le foncier industriel. Présentée comme une mission « flash », elle devra permettre de recenser l’offre disponible et identifier de nouveaux gisements, de qualifier la demande des entreprises et de faciliter l’accueil des projets industriels.
Le foncier industriel est également au cœur de l'élaboration du projet de loi Industrie Verte, puisqu'il constitue l'un des 5 chantiers identifiés (chantier n°2 : "Ouvrir des usines, réhabiliter les friches et mettre à disposition des terrains") aux côtés de la fiscalité, de la commande publique, du financement et de la formation.
Parmi les pistes explorées, l'on peut citer la réhabilitation des friches industrielles. Bien que leur recensement soit difficile, faute de définition juridique, le ministère de la Transition écologique estime à 2 400 le nombre de friches industrielles. D'autres acteurs avancent des chiffres bien plus élevés : 4 000 à 10 000 sites pourraient être concernés, pour une surface totale comprise entre 90 000 et 150 000 hectares. Un réservoir de foncier non négligeable.
L'on peut également citer la démarche des sites industriels clés en main, lancée en 2020 pour identifier des lieux propices à l'installation de nouvelles activités industriels, dans des délais fiables et maîtrisés.
Rappelons enfin que la loi Climat et Résilience oblige les EPCI à recenser leur foncier économique pour la fin de l'été. Afin de les accompagner dans cette tâche, la Banque des territoires et le CEREMA ont été mandatés pour créer et concevoir un portail national sur le foncier économique. Baptisé @zaé, ce portail est ouvert depuis le 17 avril 2023.