Rendez-vous du CNER avec Philippe Durance : repenser l’approche de l’innovation

Philippe Durance, professeur du Conservatoire national des Arts et Métiers, titulaire de la chaire « prospective et développement durable », était l’invité du dernier rendez-vous du CNER. Dans son intervention, Philippe Durance s’est attaché à présenter différents modèles d’innovation et en a effectué une interprétation critique.

Le modèle descendant

Dominant en France depuis la fin de la seconde guerre mondiale, le modèle descendant est organisé selon un circuit qui va de la recherche fondamentale, financée sur fonds publics, à la R&D, puis au développement de technologies. Centré sur la recherche d’innovations de rupture, il ignore l’importance des innovations incrémentales. En outre, il laisse de côté les aspects non technologiques de l’innovation.

Aujourd’hui, le modèle dominant est en plein bouleversement du fait de l’irruption de l’open innovation.

Le modèle chinois

A contrario, le modèle chinois de l’innovation, ou modèle Shan Zhai, est fondé sur l’imitation, qui se décompose en observation, appropriation et acculturation. Les règles de ce modèle sont :

• S’appuyer sur ce que les autres ont fait de meilleur, dans une démarche de rétro-ingénierie ;
• Améliorer les processus de production pour gagner en productivité et faire des économies d’échelle ;
• Partager l’information avec l’écosystème ;
• Ne pas produire sans avoir d’acheteur.

Le modèle social

Ce modèle, qui est basé sur une approche inverse de celle du modèle dominant, s’appuie sur trois principes :

• Tout le monde a des idées
• Seuls les résultats comptent
• Personne ne peut agir efficacement seul

Il a été soutenu au plus haut niveau politique aux États-Unis, avec la création d’un Office of Social Innovation and Civic Participation à la Maison Blanche.

Un exemple de mise en œuvre de ce modèle est la ville de Totnes en Angleterre, où, dans un objectif de réduction drastique de la consommation d’énergie, des actions concrètes ont été déployées foyer par foyer, et rue par rue, de façon participative.

Le modèle hybride

Ce modèle s’appuie sur une co-conception par les utilisateurs et des facilitateurs. L’objectif est de traduire les innovations pour les démultiplier.

En conclusion de son intervention, Philippe Durance a souligné que la France commence à évoluer. En effet, si l’État ne reconnaît pas le modèle social et le modèle hybride, un grand nombre d’expériences socialement innovantes émergent en dehors des institutions et renouvellent le « vivre ensemble » : jardins collectifs, coopératives d’habitat, consommation collaborative, santé, culture…